Le problème d'Adam Smith et conclusion

Pendant longtemps, les commentateurs d'Adam Smith ont lu la Richesse des nations et la théorie des sentiments moraux comme deux œuvres séparées, qui parlent de sujets différents et écrites à des années d'intervalle. Le premier était vu comme un traité d'économie politique et le second comme un traité de philosophie morale. En regardant ainsi, les deux ouvrages ont l'air contradictoires : la Richesse des nations semble expliquer que le sentiment moteur de la vie sociale est l’égoïsme des individus, alors que quelques années avant Smith expliquait dans sa théorie des sentiments moraux que c'est la sympathie des hommes qui est importante.

On a donné à cette contradiction apparente le nom de "problème d'Adam Smith", et ce problème a toujours beaucoup dérangé les lecteurs de Smith. Pourquoi Smith tenait-il des propos contradictoires ? Avait-il changé d'avis sur la nature humaine pendant les longues années qui séparent ses deux œuvres majeurs ? Ou existe-il une raison plus profonde qui explique cela ?

La recherche de l'harmonie universelle, clef de lecture de l’œuvre de Smith

Si on regarde l’œuvre de Smith de façon générale comme nous avons essayé de le faire dans ce cours, on voit que la contradiction disparaît d'elle-même. La richesse des nations et la théorie des sentiments moraux ne sont pas deux ouvrages indépendants mais deux pièces différentes de ce qui devait être l'histoire de la civilisation. Le but de cet ouvrage étant de mettre en évidence les lois qui conduisent la société humaine dans son ensemble à plus d'harmonie. La théorie des sentiments moraux recherche les causes de cette harmonie du côté de la morale et de la sympathie, alors que la richesse des nations recherche les causes de l'harmonie économique dans l'égoïsme des individus.
Au final, loin de s'opposer, ces deux aspects de l'individu (notre sympathie et notre égoïsme) se complètent. L'un nous permet d'avoir une morale commune et de vivre ensemble, l'autre permet le développement de l'économie qui profite à toute la société.

De nos jours, on trouve encore de nombreux cours et livres qui présentent le problème d'Adams Smith comme non résolu. La raison est simple : le projet de Smith d'écrire l'histoire de la civilisation est quelque chose de peu connu, ce qui empêche de comprendre la nature profonde de l’œuvre de Smith et d'en voir la cohérence. Nous espérons que grâce à ce cours, vous comprendrez mieux la personnalité unique de l'homme qu'était Adam Smith.

Conclusion

Nous avons essayé dans ce cours de vous présenter Adam Smith d'une façon différente de ce qui se fait d'habitude : en vous présentant la personne et sa façon de penser au lieu d'insister sur le contenu de son œuvre. Smith est ainsi un penseur des lumières écossaises, formé à la méthode empirique qui se rependait alors dans toute l’Europe. Toute sa vie, il a utilisé cette façon de penser pour mettre en évidence ce qui lui semblait être la caractéristique principale de l'histoire humaine : la société part d'un état peu organisé et conflictuel vers un sorte d'âge d'or où les rapports humains sont harmonieux. Smith ne pu jamais terminer le travail extraordinaire qui était nécessaire pour mettre en évidence ces lois de l'harmonie universelle et son projet d'écrire une histoire de la civilisation ne vit jamais le jour. Mais il nous reste de son travail deux pièces importantes : la théorie des sentiments moraux (qui est un peu oubliée aujourd'hui) et surtout la richesse des nations. Ce dernier ouvrage s'imposera rapidement comme le fondement de l'économie moderne, accordant à Adam Smith la postérité à travers les siècles pour avoir été le père fondateur de la discipline.

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